lundi 18 septembre 2006

Le discours de Ratisbonne

Depuis hier une traduction française est disponible sur le site du Monde. Jusque là on n'en trouvait que des versions allemande (l'originale), italienne et anglaise sur le site du Vatican.

A la lecture deux constatations:

- cohérence et pertinence de la pensée développée dans ce discours. Cohérence basée sur la conception du christianisme conçu comme synthèse de la révélation juive et de la philosophie grecque. Pertinence parce qu'elle repose à l'Islam la question essentielle de l'interprétation de la révélation coranique. Dire comme Alexandre Adler tout à l'heure sur FC que Benoît XVI s'en prend au "rationalisme contemporain" est un contre-sens. Au contraire, le point de vue de pape serait plutôt hyper-rationaliste. L'interprétation d'Adler reprend la position de ceux qui au prétexte de lutte contre le créationnisme font du nihilisme la position scientifique nécessaire.

- la ligne d'excuse de l'église catholique selon quoi les extraits de l'ouvrage de Manuel II Paléologue ne reflèteraient pas la pensée du pape n'est pas convaincante à la lecture du texte. Dans son discours le pape ne prend pas explicitement ses distances avec le texte de Manuel II et dans tout le discours l'Islam n'apparaît que selon la présentation de Manuel II.
Au delà du Coran et du prophète de l'Islam, l'Islam n'apparaît dans le cours du discours que (par la grâce de l'éditeur du texte de l'empereur, ou plus exactement de R. Arnaldez cité par l'éditeur) représenté par Ibn Hazm (écrit "Ibn Hazn" dans les versions allemande et anglaise), qui, s'il est plutôt connu en Occident comme l'auteur du "Collier de la Colombe", traîté sur l'amour, a surtout été, en Andalousie, le champion d'une version littéraliste de l'Islam. (Il y a chez l'éditeur un glissement: il cite Arnaldez pour illuster la "doctrine musulmane". Or Arnaldez, qui ne méritait pas ça, ne parle que de la doctrine littéraliste d'Ibn Hazm et non de la doctrine musulmane en soi.)

Le texte de Manuel II est toujours disponible aux Sources Chrétiennes (Cerf). Comme il se trouve que je l'avais, je l'ai relu pendant le week-end. L'intérêt de la lecture n'est pas anecdotique: il me semble y trouver que la citation faite par le pape n'est pas anecdotique et qu'il y a un accord plus profond (et un peu inquiétant), voir la partie, à quoi le pape fait allusion, du rapport entre les 3 lois.

Ce qui est curieux enfin, c'est la littéralité avec laquelle le pape reprend cette édition, en particulier la note de Théodore Khoury où il est fait allusion à Ibn Hazm et R. Arnaldez et où il est dit que pour l'Islam la volonté de Dieu, de par son absolue transcendance, n'est pas liée par la raison. Comme s'il avait lu ça la veille et qu'il en faisait état auprès de collègues philosophes et théologiens sans avoir pris le temps de la réflexion et du recoupement.

Conclusion: il semble que Benoît XVI soit encore un peu trop Ratzinger.







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