Revue ESPRIT - Nicolas Sarkozy, lecteur de Gramsci / Jérôme Sgard
(Plus d'extraits...)Jusqu’à il y a peu, en effet, il semblait acquis pour beaucoup que les seuls à même de réconcilier pacifiquement la France avec l’Europe, la globalisation et les marchés viendraient de l’aile centriste du Parti socialiste. Disons, de tous ceux qui auraient soutenu Rocard, Delors et Strauss-Kahn aux présidentielles passées (on pourrait ajouter Mendès-France), et qui cette fois-ci ont souvent penché pour Bayrou, tout en lisant avec avidité Cohn-Bendit. On sait que cette convergence «libérale-libertaire», apparue dans les années post-68, proposait pour résumer un projet où les risques et les tensions de la libéralisation économique seraient équilibrés par une société devenue plus vigoureuse, plus innovante et aussi plus démocrate, parce que moins centrée sur l’État. Autonomie sociale, décentralisation, européanisation : tels étaient les trois thèmes centraux du rocardisme, auxquels on pourrait ajouter la distance par rapport aux intérêts financiers privés – faites-nous confiance pour libéraliser, nous sommes désintéressés !...
Cette stratégie est aujourd’hui défaite, à la fois au plan politique et idéologique. Elle a été battue successivement par les jacobins de gauche, puis par les bonapartistes de droite, dans une sorte d’alliance intergénérationelle entre Mitterrand et Sarkozy.« Déclinisme » et néo-bonapartisme auraient en somme partie liée, là où le discours commun international voit plutôt dans le second la cause du premier. Inversement, l’appel girondin à la société civile et à la décentralisation serait associé dans un tel contexte à l’idée d’une démission ou d’un renoncement.
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