samedi 10 février 2007

Charte de la laïcité, une lecture critique de Jean Baubérot

Jean Baubérot continue son salubre travail critique en commentant par un long billet le rapport du Haut Conseil à l'Intégration, "Charte de la laïcité dans les services publics", remis le 29 janvier au Premier ministre.

Extraits:
Après avoir présenté son objet et donné quelques caractéristiques de la loi de 1905, le rapport [du Haut Conseil à l'Intégration] écrit :
« Objet d’étonnement pour le monde, la loi de séparation a suscité des émules et fait naître des imitations. En Turquie, avec Mustapha Kemal qui l’a admirée lorsqu’il était stagiaire à l’école d’artillerie de Toulouse et a voulu la reproduire dans son pays, au Mexique avec la révolution républicaine, puis dans la jeune république espagnole de 1931. Le plus souvent, ailleurs, on a préféré le schéma de l’Eglise établi ou des religions reconnues et aidées comme en Angleterre ou en Allemagne. » (p. 14)
Au Mexique, la séparation de l’Eglise (catholique) et de l’Etat date… de la Constitution de 1857 et des Lois de réforme de 1859-1861 : l’Eglise catholique séparée de l’Etat devient juridiquement une institution de caractère privé, formée comme association volontaire.
On peut ajouter que si un pays a influencé le Mexique, il s’agit plutôt des Etats-Unis que de la France. En revanche, dés la République des Républicains des années 1880, des personnalités françaises se sont dites qu’il y avait quelque chose à apprendre du Mexique.

Pour la Turquie : il est exact qu’il y a eu une influence française, mais si on analyse les choses il existe une différence de fond entre la laïcité turque (nullement séparatiste) et la laïcité de 1905 (...). En conséquence l’influence française, est celle (qui a échouée) de la « laïcité intégrale », poursuivie sous le « petit père Combes », et non celle de la loi de 1905 (...). Mais le rapport de l’HCI met auparavant dans le même sac Briand et Combes, au déni de la réalité historique.

Il me semble particulièrement inquiétant que les 3 exemple choisis (car il existait d’autres pays à séparation): la Turquie, le Mexique, l’Espagne des années 1930 soient 3 cas où la laïcité a été autoritaire (voire militaire), liée à un anticléricalisme d’Etat, voire à des manifestations d’anti religion. Est-ce ce modèle là de laïcité que l’HCI a dans la tête ? Consciemment non, puisqu’il nous a expliqué que la laïcité était plus liberté que contrainte, mais le choix des exemples est quand même très troublant. (...) Ne pense-t-on pas sans en avoir conscience que, face aux personnes dites à intégrer, il faut une laïcité un tantinet autoritaire ?

En définitive, nous avons 2 visions opposées de la laïcité française. La vision de Briand, en 1905, où la France doit se mettre à l’écoute de pays étrangers, en prendre de la graine, non pour les « imiter », mais pour être capable de changer, de faire preuve de créativité et d’inventivité. La vision du HCI où tout part de la séparation française qui étonne le monde, suscite « des émules et fait naître des imitations ».
Il faut également savoir que quand l’Assemblée Nationale a republié, en 2005, le rapport de Briand, ELLE A TOUT SIMPLEMENT ENLEVE LE CHAPITRE OU BRIAND ABORDAIT LES EXEMPLES ETRANGERS.

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