jeudi 31 août 2006

Un lapsus de Laurent Fabius...

tout à l'heure sur France-Cul.:
"Je vais vous dire ce que je pense de l'Iran: bien sûr la Perse, c'est une grande civilisation, une grande histoire, le peuple iranien est un grand peuple mais il n'empêche que les propos du président Ahmadinejab, qui veut tout simplement rayer de la carte Israël parmi d'autres babioles, sont totalement inadmissibles - et je crois avoir été le premier homme politique, peut-être vous avez noté cela, il y a plusieurs mois, à demander que monsieur Ahmadinejable et les dirigeants israéliens soient déclarés personna non grata, c'est-à-dire qu'ils ne puissent pas se déplacer...
- Après Georges Bush!
- Pardon?
- Vous avez été le premier homme politique après Georges Bush...
- Je ne sais pas, je n'ai pas noté les propos de monsieur Bush, mais..."

(fichier MP3)

lundi 28 août 2006

Les damnées de Pise

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Le diable est très laid et effrayant mais bien plus terrifiant ce détail du jugement dernier où l'on voit les damnés happés par les flammes de l'enfer.

Ce qui attire d'abord mon regard, ce sont les gestes et attitudes des deux reines du milieu, l'expression d'effroi et de pitié de la reine de gauche mais surtout l'essai désespéré que fait la reine de droite de retenir sa voisine qui est déjà tirée par les hanches vers la fournaise et les supplices, ce geste altruiste.

Ce ne sont que des femmes qui sont tirées, les damnés mâles sont à gauche, comme en attente, elles sont tirées par les hanches, presque par le sexe dirait-on. Leurs visages sont déformés par leurs cris, leur peur ou leur douleur.

Je pense à d'autres opérations de tri, à d'autres séparation et d'autres flammes. Et ce qui m'horrifie le plus est de les voir en quelque sorte mises sous l'autorité du dieu de justice...

Souteneurs de Pise

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Je n'ai pas tout de suite compris. Une sorte de taichi irrégulier et inquiet sur l'immense pelouse du Champ des Miracles.
J'ai intitulé l'ensemble "souteneurs" (ou "supporteurs") mais il y a aussi des pousseurs!

dimanche 27 août 2006

Modes de lecture

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Beaucoup de monde à la piscine de Contes - qui ferme la semaine prochaine - surtout des enfants. Il fait bon, le soleil n'est pas empêché mais l'ombre est fraîche. Nous attendons l'heure à laquelle l'autocar embarquera M., qui ne se sent décidément pas à l'aise sur la moto, pour Nice où il prendra le train du retour.

A ma droite A. lit en même temps les "Nouvelles conférences" de S. Freud en version française et un recueil de nouvelles de Raymond Carver en version originale. Elle tient le livre de poche (Freud) ouvert à l'intérieur du volume de nouvelles, un peu comme si elle voulait dissimuler sa lecture de Freud, un peu comme autrefois on cachait un roman à l'intérieur d'un livre de prière pour se désennuyer pendant la messe. Mais A. m'explique qu'ainsi elle alterne: qu'elle lit une nouvelle puis revient à Freud où elle continue de lire jusqu'à ce que lui revienne l'envie de lire une nouvelle.
M. qui nous a rejoint s'étonne. Je dis: "C'est du multitasking!". "Ah! dit M., comme Windows qui marcherait!". Et, oui, c'est exactement ça, ses deux livres sont ouverts et se chevauchent comme 2 fenêtres sur l'écran de l'ordinateur.

Pendant ce temps, à ma gauche , assise comme nous sur le banc de ciment qui court de ce côté de la piscine, une jeune fille coiffée d'une sorte de chapeau de cow-boy ou de gardian en paille lit dans un magazine people. Je la remarque parce qu'elle lit à voix haute, une anecdote ou quelque chose comme ça à propos d'une étoile adolescente, Lorie, je crois. Elle lit avec beaucoup de difficulté, en ânonnant, et jen'entends rien à ce qu'elle lit à la compagne assise contre elle.

Je me dis que tout à l'heure il faudra songer à trouver où acheter le Monde de l'Education où Christian a un article sur sa méthode, dont il est question sur son blogue hier et ce matin.

Quant à moi, au milieu, je lis les "Adieux à la Reine" de Chantal Thomas, prêté à E. qui me l'a conseillé (c'est qu'en ce moment j'essaie de lire de la littérature, et en français de préférence). Je l'ai commencé tout à l'heure et j'en suis au début, à la première séance de lecture:
"Confuse, rougissante, j'allai chercher dans la bibliothèque le volume désiré. Elle avait refusé les textes que j'avais préparés: j'étais blessée. En même temps, j'étais flattée de lire du théâtre avec elle, de lui donner la réplique."

"... je répondis de toute mon âme, avec une ardeur que je tentai de limiter, lorsque je m'aperçus que, de son côté, la Reine lisait platement. Elle prononçait les mots sans y mettre aucune intonation. Elle disait des passages, les yeux fermés, l'air concentré, comme si elle apprenait des verbes irréguliers. Elle avait complètement oublié que j'étais là. Tout à son effort de mémorisation, elle murmurait les mots pour elle-même. Je me taisais. Puis, à nouveau, elle parlait haut, alors la féérie reprenait..."
Etiquette Technorati:

Nietzsche vivant ?

Mise à jour (30.08):

Après recherche, il apparaît que ce clip (qu'on trouve en plusieurs exemplaires avec variantes sur YouTube [1], [2], [3]) est un montage avec un peu de morphing pour donner l'illusion de mouvements à partir des photographies prises en mai 1899 à Naumbach par Hans Olde (série "Der Kranke Nietzsche") pour préparer ses portraits. Ces pseudo séquences filmiques auraient été d'abord été montées à la fin d'un film brésilien de 2001: Dias de Nietzsche em Turim de Julio Bressane, d'où elles auraient été extraites pour YouTube.

Voir sur Wikipedia:
http://de.wikipedia.org/w/index.php?title=Diskussion:Friedrich_Nietzsche/Archiv_2006&oldid=28731572#Filmaufnahmen_von_Nietzsche.3F
http://en.wikipedia.org/w/index.php?title=Talk:Friedrich_Nietzsche&oldid=72757023#So-called_.22Last-Days_Footage.22

Voir aussi les discussions sous les clips YouTube (ma source).

Sorry all!

_____

Je découvre ces images mouvantes de Nietzsche grâce au site des étudiants en philosophie de Paris 4. Nietzsche bouge à peine et la plupart sinon toutes les séquences ont dû être prises à la fin de sa vie.

Traduction à main levée (non garantie, donc) des sous-titres en italien:
JE et moi sont toujours trop pris par leur colloque: comment le supporter si n'y était un "tiers"?... le tiers est le liège qui empêche le colloque des "DEUX" de s'enfoncer dans l'abîme.

Mieux vaut être fou à son propre compte que sage avec les opinions d'autrui.

Le sentiment le plus pénible qui soit est celui de découvrir que l'on s'est toujours pris pour quelque chose de supérieur à ce que l'on est.

Ce qui se fait par amour est toujours par delà le bien et le mal.

Il y a toujours un grain de folie dans l'amour comme il y a toujours un grain de logique dans la démence.

On me dit que l'homme s'aime lui-même. Hélas, combien doit être grand cet amour... Combien de mépris il doit surmonter!...

La vérité est une armée en marche de métaphores, de métonymies, d'anthropomorphismes, en bref, une somme de relations humaines...qui ont été poétiquement et rhétoriquement agrandies, transposées, parées... et qui, pour avoir été utilisées longtemps, apparaissent à un peuple solides, canoniques et contraignantes... Les Vérités sont des illusions dont on a oublié qu'elles sont telles.

samedi 26 août 2006

Le titre était: "Du matérialisme dogmatique"

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(Ce billet remplace le billet - incomplet - de mercredi dernier, consultable ici.)

Que mes quelques lecteurs me pardonnent, et en particulier Christian et Brigitte qui ont mis des commentaires sur le billet que je viens de supprimer. Ledit billet était destiné au "blog-notes", où je mets des billets de soutien ou complémentaire à ceux du blogue principal. Il s'agissait de notes de lecture destinées à illustrer un billet que je n'ai pas eu le temps d'écrire avant de partir pour Pise (voir photo). J'ai utilisé Diigo pour poster ces notes et dans la précipitation du départ, j'ai oublié de détruire la version qui avait d'abord été postée par erreur sur CB. Qui plus est je l'y est laissée sans titre, ce qui rendait encore moins claire mon intention.

Ce billet, que je n'écrirai plus, était pour noter les progrès de ce que j'appelle le "matérialisme dogmatique" et, spécialement s'agissant du premier billet cité, pour pointer dans les citations faites l'inconséquence et le cynisme, qu'on veut croire involontaire, qu'il y a à dénoncer chez les adversaires spiritualistes des manières que l'on pratique sans le moindre début de scrupule apparent soi-même, à savoir l'utilisation des fonds publics, du statut de fonctionnaire et de l'autorité de la position de scientifique au profit de la propagande de ses options métaphysiques personnelles (voir Bricmont: "la vision scientifique du monde...").

Pour être clair, je dois préciser que j'ai pensé et je pense toujours que le travail fait par l'Observatoire de Zététique comme celui fait par Jean Bricmont avec Alain Sokal pour critiquer ce qui se donne faussement pour scientifique est salutaire, nécessaire, qu'ils participent à l'hygiène de la vie intellectuelle. Il est d'autant plus pénible de les voir à leur tour franchir les frontières critiques qu'ils gardent contre les "intrusions" spiritualistes.

J'ai deux autres billets dans les tuyaux dont je ne sais pas si j'aurais le temps et l'énergie de les en faire sortir:
- l'un sur l'"intelligent design", à propos de quoi, et en faveur d'un décalage du sens de "dessein" par rapport à "design" (comparer les articles wikipedia anglais et français), les mat. dog. français font passer avec la critique, à mon sens justifiée, d'un mouvement anti-darwinien américain, leur option métaphysique anti-téléologique.
- l'autre billet serait un compte-rendu de mes récentes lectures sur l'affaire Anne Dambricourt-Malassé, affaire pénible encore dans la mesure où si je sympathiserais volontiers avec ses convictions métaphysiques telles qu'elle les expose dans les articles lus, il me paraît que ses justifications scientifiques relèvent de la même confusion critique que celle des défenseurs de la thèse adverse (les mat. dog.) - confusion qui l'amène à préfacer un livre du dangereux docteur Johnson.

Voir notes précédentes affines:
- que Darwin était, pour les mat. dog., le premier des anti-darwiniens.
- sur Philip Johnson, la téléologie et le créationisme islamique.

mercredi 23 août 2006

Brothers! Brothers! We should be struggling together!

Les dernières péripéties pré-sélection au PS et la réaction de bon sens de Garibaldo dans Nissa 2008 aujourd'hui me rappellent cette scène de "La Vie de Brian" des Monthy Python. Vous vous souvenez? Deux groupes de résistants, le CFG (Campaign for Free Galilea) et le PFJ (People's Front of Judea), se rencontrent dans les souterrains du palais de Pilate. Ils se disputent puis commencent à se battre sur le thème: "On était là les premiers." lorsque Brian intervient:
Brian: Frères! Frères! Nous devrions nous battre ensemble!
Francis: C'est ce qu'on est en train de faire!
Brian: Nous ne devrions pas nous battre les uns contre les autres! Nous devrions nous unir contre l'ennemi commun!
Tous en choeur: le JPF (Judean People's Front) ?!
Brian: Non, non, les Romains.
Tous: Ah oui. Sûr, oui.
(Image: Life of Brian pictures (.JPG) by Mr. and Mrs. and Mrs. Zambesi. Stone Dead Productions.)

Espace Grimaldi...

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à Monaco, pour l'exposition "New York, New York" (impressionnante). Je monte avec A. qui arrive de Paris et qui voudrait boire un café avant de commencer la visite. Le bar à l'étage est immense et à peu près vide. La décoration est surprenante: juxtaposition de styles en grands quartiers. Ici le quartier pseudo Louis XV kitsch.

jeudi 17 août 2006

orages

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Hier, en milieu de journée, l'air est venu plus tiède et humide. Il s'est mis à tomber de courtes averses, assez fournies, moins décevantes que celles qui accompagnaient les orages de fin de journée depuis un mois. Au milieu de la nuit, au petit matin, puis en milieu d'après-midi aujourd'hui, deux fois.
De la terre enfin mouillée montent des odeurs tropicales, des odeurs d'Asie. Précieux.

mardi 15 août 2006

Times: l'internet provoque une explosion néologique dans la langue anglaise

Un article du Times avec traduction du Courrier international, rectifiée parce que fautive. (via Champignac)

Courrier international - INTERNET • La révolution néologique de l'anglais

"Le web a changé l'anglais plus radicalement que toute autre invention, y compris le papier, et il l'a fait beaucoup plus rapidement", explique le quotidien britannique The Times, qui se penche sur la révolution linguistique en cours. "Selon Paul Payack, qui dirige l'Observatoire de la langue (The Global Language Monitor), une association californienne, la langue anglaise compte actuellement 988 974 mots et en accueille chaque mois 1 000 de plus. A cette vitesse, l'anglais adoptera son millionième mot à la fin du mois de novembre. A titre de comparaison, pour chaque mot dans la langue française, il y en a à présent 10 en anglais".

Aujourd'hui, un mot n'a plus besoin de la lente diffusion orale ou de la littérature pour se faire accepter. Si un mot fonctionne, Internet peut lui donner vie en un instant.

We're all speaking Geek - Comment - Times Online

the web has changed English more radically than any invention since paper, and much faster. According to Paul Payack, who runs the Global Language Monitor, there are currently 988,974 words in the English language, with thousands more emerging every month. By his calculation, English will adopt its one millionth word in late November. To put that statistic another way, for every French word, there are now ten in English.

Today, a word does not need the slow spread of verbal usage or literature to gain acceptance. If a word works, the internet can breathe instant life into it.
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lundi 14 août 2006

Liberté, égalité, fraternité (John Rawls)

Il est courant d'entendre opposer les deux premiers termes de notre devise républicaine. Le principe de liberté s'opposerait au principe d'égalité, la question politique serait du juste équilibre entre ces deux principes et la différence entre la droite et la gauche serait que la première favoriserait le premier principe et la seconde le second. Quant au troisième, un peu à la manière de la troisième personne de la Trinité, on ne saurait trop quoi en faire, il serait quelque chose comme un supplément d'âme.
J'ai du mal avec cette façon de comprendre notre devise. D'abord quant à l'opposition des 2 premiers principes: comment ne pas voir que la liberté se soutient de l'égalité, qu'un certain niveau d'inégalité se traduit par la perte de liberté du plus grand nombre (la liberté politique devient un leurre à partir du moment où l'information pertinente au choix politique est monopolisée par un petit nombre) et que réciproquement qu'un système qui sacrifie la liberté au nom de l'égalité ne peut que produire une inégalité plus essentielle qu'un système libéral?
C'est dire qu'il faut penser les rapports entre liberté et égalité de manière plus complexe et articulée qu'en termes de balance et d'équilibre quantitatif entre un plus et moins de ceci et en conséquence un moins ou plus de cela (oui, je sais, c'est évident mais vous la voyez souvent appliquée, cette exigence évidente, dans le débat politique?).
Quant au troisième terme, au-delà de l'embarras, j'avais tendance à le trouver un peu suspect: cet appel à la fraternité me rappelait la complicité des frères après la perpétration du meurtre du père dans l'expérience de pensée de Totem et Tabou (quelque chose, donc, qui avait à voir avec le partage des femmes - le côté "genre", masculin, du troisième principe ajoute à l'embarras généralement éprouvé à son propos et on a tendance à le remplacer par le principe de solidarité, ce qui ne pose pas moins la question de son articulation aux deux premiers).

A partir d'une autre expérience de pensée, John Rawls donne, me semble-t-il, des outils pour penser l'articulation des trois principes de notre devise républicaine, et de les penser dans leur ordre même, avec la priorité donnée à la liberté et le troisième principe comme médiateur qui permet d'articuler les 2 premiers dans leur solidarité même (et sortir ainsi le troisème terme, qu'on l'articule "fraternité" ou "solidarité" de son imprécision moralisatrice).

Voir mes notes de lecture sur cercamon-wp.

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chappals (design vernaculaire)

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Un exemple de design "vernaculaire" (au sens d'Illich): j'ai coupé la lanière de la sandale du pied droit, qui était abîmée et en me disant que ça ne devait pas changer grand chose. Depuis la sandale droite me glisse sans cesse du pied et je me demande selon quel mécanisme cette lanière fragile, presque jamais en tension, assure la tenue de la sandale, comment à elle seule peut-elle empêcher le pied de glisser vers l'arrière alors qu'elle n'a en apparence aucun effet sur lui?

jeudi 10 août 2006

Situation stratégique de la Turquie: 2 articles de l'IHT

En complément du billet précédent et pour enfoncer le clou, j'ai mis des extraits de 2 articles [1 eng] [2 eng] parus aujourd'hui dans l'International Hérald Tribune:
Dans les deux cas, les auteurs pointent l'importance stratégique cruciale de la Turquie, soit au regard de la "petite" catastrophe libanaise actuelle, soit au regard de la catastrophique prolifération nucléaire en perspective.
Dans les deux cas encore, les auteurs pointent le rôle essentiel de l'Europe et de la promesse d'intégration européenne de la Turquie.

Et tant pis si je donne l'impression de radoter mais je répète que le niveau du débat national à ce sujet est d'une indigence à pleurer, lamentablement centré sur nos nombrils et nos soucis narcissiques, à cent lieues au-dessous de ces enjeux stratégiques qui devraient nous crever les yeux (mais c'est peut-être justement de ça qu'il s'agit!).

Comme je reviens régulièrement sur le sujet, je me permets de donner ici une précision pour être clair: je pense que l'adhésion de la Turquie à l'Union Européenne selon des conditions strictement vérifiées (pas inconditionnelle, donc, ni laxiste) serait une chance inestimable pour l'Europe et pour le monde et que, par conséquent, notre devoir de citoyens français et européens serait de faire tout ce qui dépend de nous pour rendre cette adhésion (telle que définie) possible. Voilà, c'est dit et que l'on me pardonne la présomption.

mardi 8 août 2006

L'horizon des catastrophes: Chavez et Ahmadinejad

Chavez et Ahmadinejad, Téhéran, le 30 juillet dernier:



L'original (plus long, 18 min.) est sur Memri TV. L'intérêt du document s'atteste de ce que celui qui l'a posté sur YouTube, Abu Mustafa, n'en attend sans doute pas les mêmes effets que l'équipe de Memri TV (or does he?)!

On peut entendre les propos d'Ugo Chavez comme une confirmation de tendances déjà dénoncées, on peut se moquer comme d'une bouffonnade de sa tournée anti-américaine, on trouvera sans doute inquiétant cet accord entre le Vénézuélien et l'Iranien mais lorsque Chavez demande au nom de quoi 5% de la population mondiale s'arrogerait le droit exclusif de consommer 20% des ressources énergétiques limitées du globe et au nom de quoi les pays possédant la technologie nucléaire interdiraient aux autres de la posséder, comment ne pas voir que ces arguments portent et que les réponses occidentales jusqu'à présent ne font qu'en renforcer la portée?

L'Occident ne peut accepter que l'Iran, dont le président déclare que la destruction d'Israel est la solution finale aux problèmes du Moyen-Orient, se dote de l'arme nucléaire mais n'a pas d'argumentation audible aux peuples non-occidentaux pour leur faire partager ce refus. On a là un horizon catastrophique: faute de projet réellement universaliste, l'Occident se protège de catastrophes prévisibles par des moyens qui accroissent les conditions de la catastrophe. Les évènements actuels, la catastrophe libanaise, sont une application exacte, bien que contenue, de cette situation. On aurait pu voir dans l'Europe, comme porteur possible d'un projet universaliste, un acteur susceptible de casser cette logique. Les référendums du printemps 2005, l'éloignement concommittant de la perspective d'adhésion de la Turquie comme membre de plein droit, rendent cette possibilité de moins en moins probable.

(voir aussi sur Memri TV une interview de Chavez à al-Jazeera: "Either we succeed in 1,000 different ways to end imperialism, or else imperialism will use 1,000 different ways to annihilate the world. This would constitute the end of mankind, the end of our hopes. Jesus Christ called on us to live in the Kingdom of Peace, but there can be no peace without freedom. I'm a Christian, and I believe that Jesus came to announce to us the coming of the Kingdom of God, and the Kingdom of God is peace, equality, and justice. The American empire is the number one enemy in the way of the Kingdom of Peace and Justice" (trad. Memri))

Complément: La bombe iranienne: commentaires sur le blogue de Patrick Mottard

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dimanche 6 août 2006

Ruminations (suite): indignations

Beaucoup réfléchi à mes intolérances: comme j'ai initialement réagi au texte de B., comme j'ai éteint la radio l'autre jour, après m'être efforcé, en vain, à écouter l'émission d'Aline Pailler. Je crois reconnaître une raison de mon intolérance (de mon énervement à un certain ton, une certaine manière, un certain style, une certaine rhétorique), dans le traumatisme du référendum européen. Je retrouve le même type de consensus, le même mécanisme. Mécanisme d'impuissance, rôle des "philosophes" ie rhéteurs... Ce qui fait que je réagis très fortement dès que je reconnais cette rhétorique même lorsque le contenu peut me paraître proche de ce que je pense. Chat échaudé craint l'eau froide. C'est ainsi que je suis en dette depuis quelques jours d'un billet sur l'immigration: je m'aperçois que j'ai réagi ces dernières semaines au ton des argumentaires anti-sarkozyste, ce qui fait que je m'apparais à moi-même, et que dire alors des autres, comme défendant ces lois, alors que, si je me pose calmement la question, je me rends bien compte que j'y suis opposé. Les argumentaires de ceux qui les combattent me poussent dans l'autre camp, ce à quoi il me faut résister. Et je suis ainsi en dette d'une petite note sur les lois Sarkozy qui ne soit pas réactives à ces indignations de gauche où je crois reconnaître reconvertie l'énergie rhétorique qui fut noniste.

samedi 5 août 2006

Ruminations oisives

L'orage gronde. Nous nous préparons à partir pour l'Italie.

La radio (FC!) est bonne fille avec moi. Tout à l'heure, elle me donne une seconde émission avec Jean-Pierre Dupuy, qui vient compléter celle de samedi dernier dans la direction exacte qu'avaient prise mes ruminations. Hier soir, le "grand débat contemporain" (rencontre de Grenoble) est consacré au capitalisme, pile ce qu'il me fallait pour continuer l'autre embranchement des mêmes ruminations. Et entretemps Elizabeth Roudinesco revient sur l'hystérie, la comparant avec la dépression, expliquant que la chute du mur de Berlin a marqué le remplacement du règne de la première (la révolte) au profit de la seconde, d'une manière qui consonne parfaitement avec les considérations sur la perte du sens du "philosophe" Patrick Viveret au grand débat d'hier soir.
Incidemment, j'apprends que Jean-Pierre Dupuy a travaillé avec Ivan Illich... Donc je me décide tout à l'heure, juste avant la sieste, à ouvrir le gros 2e volume des oeuvres d'Illich, la destruction du vernaculaire. Et ça me rappelle un moment du débat d'hier soir, ce que disait Patrick Viveret, la disparition du secteur gratuit, je me rends compte que c'est du Illich tout cru. Cela avait été repris par Peyrelevade et je m'étais dit que personne, ni l'alter Viveret, ni les économistes Cohen et Fitoussi, ni les "exécutifs" Peyrelevade et Lamy, n'ont fait d'allusion au développement des échanges et de la production non marchande sur l'Internet (j'avais il y a quelques mois remarqué la même cécité chez Attali).
Tout cela est assez réjouissant... enfin, un peu inquiétant aussi: ne pensé-je que par réaction? Bessai, en tous cas ça a déjà été plus dispersant.

Abd al Malik: rap et soufisme



Jonchée de liens à propos d'Abd al Malik, découvert hier matin par "les autres":


Les commentaires du dernier billet lié ici sont à lire: dans l'inteview Abd al Malik s'explique sur l'allusion à Tariq Ramadan dans un de ses morceaux et sur ses différents avec ce dernier. Plusieurs commentateurs lui reprochent son angélisme (d'autres, dans un contexte non musulman, verraient en lui un "bounty"; dans le contexte rap, ils reconnaissent le syndrome McSolar...).
La position du soufisme dans les débats et les enjeux actuels est intéressante: sous-médiatisé du moment qu'on parle politique, condamné par le wahabisme, il lui est reproché par les anti-musulmans d'être le miel pour attirer les idiots utiles à l'Islam conquérant mais les islamistes lui reprochent symétriquement de stériliser la conscience musulmane en la dépolitisant.

Paroles Abd Al Malik - Les autres - lyrics Abd Al Malik parole lyric
J'étais voleur et avant d'aller voler, je priais
je demandais à Dieu de ne pas me faire attrapper
je lui demandais que la pêche soit bonne
qu'à la fin de la journée, le liquide déborde de mes poches
bien souvent, j'ai failli me noyer, j'ai été à sec aussi, souvent....
quand je croisais papa, le matin, aller travailler avec sa 102 bleue
en rentrant, le matin, de soirée, j'me disais "c'est un bonhomme mon vieux"
ensuite, j'me faufilais dans mes couvertures et j'dormais toute la journée
le style "Vampire" dormir la journée et rôder une fois le soleil couché
le genre de prédateur à l'envers, le genre qui à la vue d'un poulet meurt de peur
je ne me suis jamais fait prendre, et si j'avais été pris, aux keufs, j'aurais dit...

Les autres, les autres, c'est pas moi c'est les autres....
Le Bondy Blog: Abd al Malik sur les pas du King
"L’islam, moi, me rapproche des autres. Et je me suis aperçu que la France et ses lois étaient une chance, bien que, dans la réalité, il y ait des citoyens de seconde zone. J’avais le choix entre une posture de clash ou une posture intelligente. La France est multiple, multiculturelle. Il faut avancer tous ensemble avec un projet commun. Il faut faire en sorte que la France soit en phase avec ses citoyens. Pour moi, le meilleur moyen de faire avancer ce message, c’est l’art. Je suis un passionné d’écriture. Toute ma démarche est basée sur ça. En même temps, j’estime avoir une démarche militante. Pour moi, le patriotisme n’est pas quelque chose de négatif. Je suis patriote français, j’aime mon pays."
Nouvelles Clés - Entretien : Abd al-Malik
"On sait bien que les premières victimes des violences sont toujours les personnes les plus fragiles, autrement dit les gens des quartiers eux-mêmes. Les voitures qu’on brûle, les écoles qu’on brûle, ce sont les nôtres ! Nous nous lançons des pierres à nous-mêmes. Et ça, c’est la preuve que nous sommes à bout. Quand quelqu’un n’en peut plus, il se suicide. Mais on sait bien que la plupart de ceux qui font des tentatives de suicide ne veulent pas mourir ; ils envoient un message désespéré : « Écoutez-moi, j’existe!» C’est exactement ce qui est en train de se passer."
Abd Al Malik: 'Ma force personnelle me vient de l'Islam'
"C'est bien dans cette démarche que j'ai dit « La Suisse » et que je n'ai pas cité de nom. Je n'ai rien contre cette personne, mais aujourd'hui, dans ses propos, c'est comme si être musulman devenait un acte politique. Ceci est un danger. Pour moi l'islam est une spiritualité. C'est quelque chose qui nous nourrit à l'intérieur et qui nous pacifie, nous-même et notre rapport aux autres, à la fois aux musulmans mais aussi aux non musulmans. C'est toute cette notion de Djihad Annefs (la lutte contre soi-même). De mon point de vue, il est très important de ne pas être dans l'amalgame ou une personne qui voudrait entrer en islam ou qui s'y intéresse, pense qu'être musulman c'est avoir tel avis politique ou telle démarche."

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vendredi 4 août 2006

Hier soir, à la Paloma...

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... la canicule est terminée! Au bord de l'eau, il fait presque frais, délicieux.

LaserPoésie 70


"Le 26 Février 1936 il y avait un coup d'état à TOKYO organisé par de jeunes officiers contre le système de l'armée japonaise et son gouvernement et contre le fascisme. Tous les jeunes officiers ont été exécutés au nom de l'empereur (même si un des frères de l'empereur était lui-même impliqué dans ce coup d'état). Faisant partie de ces jeunes officiers, il a peint avant d'être exécuté et transmis sa peinture à son beau-père. Il avait 30 ans. Puis le Japon s'est engouffré dans la deuxième guerre mondiale et fut vaincu (une page cachée de l'histoire du Japon). Dans son testament on retrouve les extraits suivants: " je regrette avoir cru en mes
supérieurs qui nous ont manipulés au nom de l'empereur" " je voudrais regarder le bleu du ciel" "je voudrais nager dans les lumières du soleil" "et je voudrais laisser mes traces de pieds jusqu'au bout de cette terre immense" "je voudrais respirer jusqu'à la dernière bouffée de mon poumon le parfum des feuilles de bourgeons des arbres" "puis j'aimerais travailler pleinement…après avoir tout perdu, mon coeur revit" Takeshima TUGUO.
Ils étaient précurseurs du Japon Moderne."
(Je viens de recevoir le dernier numéro de LaserPoésie - 70 - de Yoko, Yayoi et Karim. yokogunji[at]wanadoo[point]fr)

mardi 1 août 2006

Indignations et catastrophes

La discussion sur la politique d'immigration, entamée sur Reprises et archivée ici, a rebondi jeudi dernier en commentaires sur un billet de Strani: "l'Indignation en fête".
J'avais cette discussion en tête en prenant une note à l'écoute d'une récente émission où était interviewé le philosophe Jean-Pierre Dupuy. Ce qui m'est apparu alors, c'est la nécessité de penser la question de l'immigration selon un horizon global "catastrophique" (voir le diaporama sénégalais lié dans mon précédent billet). La liaison entre la question nationale de l'immigration et le déséquilibre global entre pays pauvres et pays riches est évidente et elle est faite partout mais ce que me montrait Dupuy, c'est qu'on ne pouvait s'arrêter là et qu'il faut penser la question de l'immigration en même temps que celle du développement, de la croissance et du risque climatique.
Par ailleurs, j'ai reçu ce matin d'Anne un projet d'article sur le sujet, proposé, semble-t-il, à Charlie-Hebdo par un professeur de philosophie. J'en parle ici parce qu'à la fin du papier l'auteur écrit:
L’étranger (substantif) c’est en réalité celui qu’il faut « étranger » (verbe) pour que la nécessité de sa présence (...) reste soumise à la discrétion et à l’arbitraire de ceux qui gèrent les populations comme des stocks de marchandises. Ceux dont nos sociétés ne supportent pas de reconnaître qu’elles en ont besoin doivent devenir clairement et rationnellement, à tout moment, susceptibles d’être exclus : reconduits, asservis, avilis, réduits de plus en plus à la misère, discriminés. En d’autres temps, ils furent réputés tuables. C’est, souterrainement, la même logique. Celle des camps de la mort des années 1942-45, celle du massacre des Algériens d’octobre 1961.
Ce que je trouve intéressant ici, c'est que la question des expulsions est pensée dans un cadre plus large: on y reconnaît l'allusion à la problématique de l'"immigration choisie" mais surtout on peut y reconnaître, il me semble, à un niveau plus large encore, la problématique heigeggerienne de la technique. La mise en parallèle, comme application de la même logique, des expulsions d'immigrants illégaux avec les camps de la mort nazis peut sembler contestable et une nième application de la loi de Godwin, je crois plutôt y reconnaître un écho de la célèbre déclaration de Heidegger en 1949. Le papier cité ici ne parle que de l'arraisonnement des hommes, pas de la nature, mais si l'on accepte d'y lire un écho de Heidegger, on arrive à l'horizon des catastrophes, selon une logique, cependant, qui n'est pas celle des catastrophes mais celle des crimes (les catastrophes ont, éventuellement, des responsables, les crimes ont des coupables).

On voit bien ce que la pensée heideggerienne a de pertinent à la convergence de nos catastrophes. Cette pertinence est telle, que pensée sous l'hypostase de la Technique, elle bouche l'horizon d'un projet politique de sortie de la dynamique des catastrophes, en amont d'une analyse critique et d'une généalogie des catastrophes. Ce qui est vrai de la pensée heideggerienne est vrai des pensées analogues qui, en hypostasiant le Mal (la Technique, le Libéralisme, etc.), ne laisse la place qu'à l'indignation ou au retrait.

Pour citer Bertrand Ogilvie (à qui j'espère que le récent limogeage de Marcel Bozonnet aura fait prendre conscience que le voir en fantassin de l'ordre moral était pour le moins une bévue - soit dit en passant):
"La jouissance de l’indignation remplace trop souvent la lutte quotidienne, plus obscure, moins gratifiante narcissiquement, moins médiatique, mais plus effective."
(l'Huma du 10 juin dernier)

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