lundi 30 mai 2005

Après coup

Eliane me dit qu'elle a écouté Emmanuel Todd à la radio aujourd'hui, qu'il a été très convaincant (pour le oui), qu'elle en a entendu d'autres et qu'elle se demandait pourquoi on n'avait pas entendu ça avant le scrutin. Cela pourrait passer pour une impression trompeuse... mais je me suis rappelé que ce matin Marc Kravetz, qui s'était scrupuleusement gardé de laisser entrevoir son choix au cours de ses chroniques matinales jusqu'à dimanche, ce lundi matin a enfin parlé d'Europe... Il s'est passé une chose que je ne comprends pas bien au cours des semaines de la campagne. Qu'on jette un coup d'oeil sur le graphique que j'ai trouvé sur le site d'Ipsos:

Le oui qui était largement majoritaire avant la campagne s'effondre brutalement après l'annonce de la date du référendum par JC. Une explication partielle doit être que c'est le moment où on commence à regarder le texte et on se dit alors que comme constitution, c'est pas terrible. A partir de là, le non s'installe en position nettement majoritaire, avec des fluctuations mais sans évolution nette. Jusqu'au 15 avril. A partir du 15 avril s'amorce un mouvement symétrique de celui qui avait suivi l'annonce de la date du référendum, le oui remonte et repasse en tête (optimistes ouistes, on se dit que le débat paie et que l'inconsistance des arguments du "non-pour-l'Europe" commence à apparaître) mais ça ne dure pas. Autour du 1er mai nouveau renversement de tendance: le non recommence de progresser et ne cesse plus dans une évolution rectiligne jusqu'au vote et à la victoire du non.

A revoir l'ensemble comme ça, ça ressemble à un match de tennis et si j'essaie de comprendre ce qui se passe autour du 1er mai, je trouve bien quelque chose comme ce qu'on trouve au tournant d'un match de tennis, une question de moral.

Ce qui me semble (mais j'ai du mal à croire que ce soit une explication suffisante, c'est la seule que j'ai, à date), c'est que les partisans du non, au moment où la partie adverse semble reprendre décisivement l'avantage, changent de stratégie et entament une contre-offensive extrèmement efficace. Qu'on écoute Max Gallo et Yves Michaud lors de l'émission "l'Esprit Public" du 1er mai. Ils laissent les arguments de contenu pour un méta-discours sur le thème de la domination des élites-pour-le-oui dans les médias et installent des binarités, la principale étant élites / peuple, avec des variantes comme vieux / jeunes et des accents de théorie du complot.
L'argument avait pour le moins des apparences de vérité (je ne suis pas sûr que la domination des partisans du oui ait été aussi absolue dans les médias - voir un article du Monde du 19 mai dernier - ni que les élites aient toutes été du côté du oui), il a sans doute touché les électeurs mais aussi et surtout les partisans du oui. Il les a comme culpabilisés. Ceux de gauche du moins. Ils se sont retenus. Et ils ont perdu.
J'y vois quelque chose comme une manipulation du surmoi (qui, comme chacun sait est de l'ordre de l'inconscient) communiste de la gauche de gouvernement qui serait brillante si elle était tout à fait délibérée.

Une dissection des votes du référendum est en ligne sur le site de l'Ipsos, pour réfléchir à leur signification, où l'on trouvera entre autres que le clivage jeunes / vieux est moins binaire que ce qu'on en a dit.

dimanche 29 mai 2005

Posts récents

- Armelle et Eliane dans le Tassili
- Concerts: Kala Ramnath à Contes (3 juin) & à Montauroux (5 juin)
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- Suppression de la chaîne culturelle de Radio-Canada
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En attendant les résultats: vu de Chine

L'agence de presse chinoise, Xinhua, ne fait pas dans la dentelle:
Si les Français votent non dimanche, ce sera surtout un drame pour la France, notamment un coup très sévère sur la diplomatie de la France, qui perdra toute sa crédibilité dans le monde, parce qu'elle, en tant que l'un des pays fondateurs de l'UE, est à l'origine de ce projet de Constitution et qu'elle est aussi l'image de marque du Vieux continent aux yeux de nombreux pays étrangères. Le vote négatif signfiera également une perte d'influence de la France sur la scène internationale.

samedi 28 mai 2005

Oc

Finalement on est un gros paquet d'accord: le texte est pas bon, c'est pas une constitution, l'Europe fonctionne mal et le traité en soi n'y changera rien, on veut plus de contrôle démocratique, plus d'Europe politique, etc. et demain certains d'entre nous voteront non, certains d'entre nous voteront oui. Alors demain soir, quel que soit le résultat, il faudrait pas qu'on se retrouve comme après un match de football, à ruminer notre défaite ou à fêter notre victoire. La vrai défaite serait d'avoir été pour longtemps divisés par ce référendum, la vraie victoire serait de faire de ce référendum l'occasion de nous rendre compte, concrètement et dans le détail, de ce qui nous rassemble (et peut-être de construire un rapport de forces).

Moi, je voterai oui. Comme la plupart d'entre vous j'ai hésité, j'ai balancé. Je construis des argumentaires dans ma tête depuis deux mois à en être écoeuré. Alors plutôt que de les déposer ici j'en lie deux:
- l'appel d'Eric Clémens sur Sitaudis,
- le point de vue de Ben dans sa dernière newsletter.
(Dernière minute: pour une argumentation plus détaillée, celle d'Emmanuel de Ceteris Paribus sur le blogue de Publius.)

dimanche 8 mai 2005

Des blogueurs branchés sur France-Culture: Palomar

L'écoute de France-Culture, de préférence par l'Internet, est un complément idéal au blogage.
Il y a quelques mois j'avais remarqué que Versac organisait ses blogrolls selon les titres d'émissions de France-Culture. Hier je fais la connaissance d'un nouvel blogueur-auditeur FC par un commentaire sur un post de février.
Palomar est une sorte d'ermite hospitalier des Cantons-de-l'Est qui blogue en deux versions (français - english) et qui tient sur son site une archive des programmes de France-Culture. Comme il me fait de fortes honnêtes propositions (dont un mauvais paramétrage des commentaires me cache la date) j'ai à lui répondre.

(en complément: suppression de la chaîne culturelle de Radio-Canada)

lundi 2 mai 2005

FC > Concordance > les protestants et la République

Il y a deux mois, je postais quelques remarques sur la situation des politiques juifs et protestants dans le système politique français. Après avoir écouté la chronique de Daniel Cohen, on peut écouter l'émission "Concordance des temps" du dernier week-end, consacrée aux protestants dans la République.
Posts précédents:
- Laïcité: le blogue de Jean Baubérot
- Les protestants français et le pouvoir
- Arte: Mendès-France & Mitterrand

dimanche 1 mai 2005

FC > l'enseignement des sciences

"J'ai des promotions importantes, 300 élèves, qui n'ont pas tous vocation à devenir physiciens, d'ailleurs de moins en moins veulent devenir physiciens, ils vont plutôt vers la technique, le management, etc., mais je pense qu'un ingénieur en 2005 doit connaître des rudiments de relativité, de mécanique quantique également. Ce sont des populations de jeunes avec lesquelles on a du mal à plaquer un formalisme au tableau pendant 3 heures, les amphithéâtres sont de plus en plus difficiles à tenir.
...
Il y a des cours que je donnais il y a 15 ans que je ne peux plus donner parce que l'attention des élèves est plus aléatoire, ils ne sont pas tous intéressés. Donc si je commence par écrire les transformations de Lorenz en dévoilant leurs conséquences ultimes, je perds rapidement la moitié de l'amphi. Il faut trouver des ruses, on peut par exemple jouer sur les paradoxes, commencer par le paradoxe des jumeaux de Langevin et montrer qu'il a une explication parfaitement dans le cadre de la relativité restreinte et que l'idéal du temps newtonien, finalement, est un idéal qu'on peut discuter, on peut aussi montrer que la relativité a des conséquences philosophiques négatives (...) et que ça remet en cause des choses que les étudiants croyaient fermement, on peut aussi faire un peu d'histoire..."

(Etienne Klein sur Science-Frictions (p) l'autre samedi, à propos de ses promotions de l'Ecole Centrale)

La veille (le 22), le directeur de l'enseignement supérieur, Jean-Marc Monteil, était à Nice pour signer le contrat de l'Université de Nice Sophia-Antipolis et pour inaugurer par une conférence la célébration du 40e anniversaire de notre université. Cette conférence (en ligne sur le site de l'UNSA), qui abordait la question de la désaffection des sciences, était donnée sans notes et témoignait d'une pensée vigoureuse et structurée. J'ai regretté cependant que lorsqu'il s'est agi d'illustrer l'intérêt de la science, les deux exemples qui ont été pris l'ont été dans le domaine de la technologie: le téléphone cellulaire qui me permet de converser en temps réel avec un interlocuteur outre-atlantique et le pont de Millau, et non du côté de ce qui fait la spécificité de l'activité scientifique, la libido sciendi ou le plaisir que donne l'exercice de la pensée dans la stricte discipline de la science. Est-ce le meilleur moyen de plaider pour la science que de la soumettre à une finalité extérieure? Il me semble que si l'on dit aux lycéens suceptibles de faire des études scientifiques et de la recherche que la science est bonne en raison de ses retombées technologiques et économiques, la conclusion qu'ils risquent d'en tirer est qu'il vaut mieux devenir ingénieur voire s'orienter vers des études de gestion et de marketing. C'est d'ailleurs, si j'en crois ce qui se dit, ce qu'ils font de plus en plus. (A quoi il faut ajouter que le développement technologique n'est peut-être plus, pour les générations lycéennes, une fin en soi et que ce qui se métonymisait électricité, supersonique et informatique a tendance à se métonymiser aujourd'hui nucléaire, OGM et clonage humain.)

Voir aussi: Comment mieux enseigner les mathématiques (je viens de corriger le lien vers le rapport cité).

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